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Le Conseil d’Etat suspend le décret interdisant l’utilisation des termes empruntés au secteur de la viande pour la dénomination des produits composés de protéines végétales

Par un arrêt du 27 juillet 2022 (CE, juge des réf., 27 juill. 2022, n° 465844), le Conseil d’Etat a statué sur la requête en référé déposée par l’association Protéines France à l’encontre du décret d’application de l’article L410-10 du Code de la consommation, entré en vigueur le 30 juin 2022 et qui devait s’appliquer dès le 1er octobre prochain. La Haute juridiction a rendu une décision qui suspend l’application du texte.

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Ce décret venait appliquer une disposition prévue par l’article 5 de la loi relative à la transparence de l’information sur les produits agricoles, introduit à l’article L410-10 du Code de la consommation, visant à interdire l’utilisation de termes utilisés pour les produits issus des secteurs de la viande et du poisson (tels que les dénomination saucisse, ou encore steak), pour commercialiser des aliments à base de protéines végétales.

Dans sa décision, le Conseil d’Etat a en premier lieu retenu le caractère urgent de la requête, en considérant l’impossibilité pour les sociétés commercialisant de tels produits, de tenir l’échéance du 1er octobre 2022 au regard des délais impliqués par la modification des emballages, mais également les démarches commerciales, jugées importantes, à initier de la part de celles-ci afin de pérenniser leur vente à l’égard de leurs consommateurs (telles que le développement de nouvelles dénomination et images de marques). La juridiction suprême de l’ordre administratif a énoncé qu’il n’existait pas en l’occurrence, d’intérêt public qui prévaudrait sur ces conséquences pour les entreprises du secteur, et qui justifieraient ainsi l’exécution des dispositions à la date d’application prévue par le décret.

En second lieu, afin de conclure à la suspension du texte, le Conseil d’Etat a notamment retenu une «imprécision dans la caractérisation des termes dont l’usage est prohibé », et s’est fondé sur « l’absence d’accès gratuit pour le public aux codes des usages auxquels l’administration fait référence pour en éclairer la portée ». Ce faisant, la juridiction suprême a jugé recevable l’argument de la requérante affirmant que les termes visés par l’interdiction n’étaient pas assez explicites et portaient atteinte au principe de sécurité juridique.

La décision se fonde également sur l’existence de sanctions pénales en cas de violation des dispositions du décret, et sur le fait qu’une définition insuffisante des manquements susceptibles d’être reprochés allait ainsi à l’encontre de « l’objectif à valeur constitutionnelle de clarté et d’accessibilité de la norme », permettant aux justiciables de se conformer à ces dispositions.

 En outre, le Conseil d’Etat a déclaré que le décret pourrait également aller à l’encontre du droit de l’Union européenne (article 17 du règlement 1169/2021 sur l’étiquetage des denrées alimentaire), dès lors que ce dernier prévoit que la dénomination d’une denrée alimentaire est en principe « son nom usuel ou, à défaut, son nom descriptif », et que les termes que le décret d’application en cause vise à interdire « pourraient correspondre à de tels noms usuels ou, à défaut, noms descriptifs ».

L’ordonnance du Conseil d’Etat est disponible ici.